
Révision du Règlement CE 261/2004 : le Parlement européen se dresse contre le Conseil de l'UE
“Nous ne permettrons pas que les citoyens soient laissés pour compte”. Le Parlement européen, par l’intermédiaire de son rapporteur¹, a clairement fait part de son opposition au projet de révision présenté en juin dernier par le Conseil de l’Union européenne.
Air Indemnité, spécialiste de l'indemnisation des passagers aériens, vous décrypte la situation.
Le bras de fer sur la réforme du droit des passagers aériens est engagé
Le 5 juin 2025, le Conseil de l’Union européenne a proposé de réformer brutalement le droit issu du Règlement européen CE 261/2004 (le “Règlement”) protégeant les passagers aériens en cas de retards, annulations et surbooking. Parmi les principaux thèmes visés par le Conseil, on relève les suivants :
- Seuils de déclenchement du droit à indemnisation : déclenchement du droit à indemnisation à partir de 4 heures ou 6 heures de retard selon la distance parcourue
Ce droit est actuellement garanti à partir de 3 heures de retard - Montants d’indemnisation : les passagers peuvent prétendre à une indemnité de 300 euros pour les vols de moins de 3 500 km (et tous les vols dans l’UE) ou 500 euros pour tous les autres vols
Aujourd’hui, un passager peut prétendre à une indemnité de 250 à 600 euros - Circonstances extraordinaires : extension de la liste des cas pouvant exonérer une compagnie aérienne du paiement d’une indemnité avec l’inclusion de causes “internes” (maladie du pilote ou encore panne technique)
En l’état du droit en vigueur, seuls les événements qui ont une origine externe à la compagnie aérienne peuvent être en mesure de justifier une “circonstance extraordinaire”
Prenant acte de la menace que fait peser cette proposition sur la protection des passagers, le Parlement européen a, le 13 octobre dernier, répondu avec fermeté : pas de compromis possible pour un recul des droits des passagers. Sur les points visés précédemment, le Parlement fait, par ailleurs, des contre-propositions :
- Seuils de déclenchement du droit à indemnisation : maintien du seuil de déclenchement du droit à indemnisation à 3 heures
- Montants d’indemnisation : maintien de 3 forfaits d’indemnité (et de 3 paliers correspondant aux distances parcourues) et revalorisation du premier forfait passant de 250 à 300 euros pour tenir compte de l’inflation
- Circonstances extraordinaires : création d’une liste limitative de circonstances extraordinaires pour offrir davantage de sécurité juridique aux passagers (et, ainsi, aligner le texte du règlement sur la jurisprudence constante de la Cour de justice de l’Union européenne)
Un accord est-il possible pour l’adoption d’un nouveau texte ?
La position du Parlement européen est en accord avec celle qui était la sienne lors des 2 dernières tentatives de réforme du Règlement en 2013 puis en 2020. Le Parlement reste fidèle à l’objectif de protection des passagers, affirmé dans les premières lignes du Règlement et confirmé par l’évolution des décisions de la Cour de justice de l’Union européenne depuis une vingtaine d’années.
Par ailleurs, le vote du 13 octobre dernier au sein de sa commission Transport est sans appel : 34 députés se sont dits favorables à la contre-proposition du Parlement, 2 autres se sont abstenus (et aucun ne s’y est opposé).
Des négociations doivent maintenant se tenir entre députés et membres du Conseil pour parvenir à un accord.
Il semble toutefois que les positions de chacune des institutions soient irréconciliables tant leurs visions du droit des passagers aériens semblent, aujourd’hui, éloignées. Finalement, compte tenu de ces disparités d’opinions, de l’inertie et de la lourdeur de la procédure législative européenne, on peut s’attendre à ce que la version initiale du Règlement perdure.
Conseil et Parlement : de quoi s’agit-il ?
- Le Conseil de l'Union européenne est une institution de l'UE notamment chargée de négocier et d'adopter les textes qui vont s'appliquer dans l'Union (dont les Règlements). Elle est composée de ministres (aux qualités différentes, en fonction des sujets à traiter) de chaque Etat membre.
- Le Parlement européen est co-décisionnaire pour l'adoption des règles. Il participe au processus législatif au même titre que le Conseil et dispose notamment d'un pouvoir de surveillance sur toutes les institutions de l’UE. Il est, quant à lui, composé de 720 députés depuis 2024.
1. source : Parlement européen - Actualités
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